Crédit:

Cet atelier de lecture qui fait tant rêver...

Lundi 1er août 2016. Il est 11h30 a.m. Nous sommes à Carrefour-Feuilles, en plein coeur d’une petite bibliothèque pour enfant aménagée dans cette maison familiale qui invite à la retraite. Des livres sont exposés sur une table autour de laquelle des jeunes, une dizaine, écoutent attentivement le professeur Marc Exavier, ce féru de littérature qui, non sans plaisir, parle de Marie Vieux-Chauvet. C’est l’été, c’est donc les vacances. L’heure est aux plaisirs de toutes sortes, mais surtout la lecture et la découverte. C’est, en tout cas, ce qui réunit ces fous du livre et de la lecture en ce matin ensoleillé. L’auteur de Numéro effacé est dans son assiette. L’atelier annoncé depuis tantôt un mois sur l’auteure de la très célèbre trilogie Amour, Colère et Folie, le roman le plus cité et le plus connu mondialement, est lancé.

Ce lundi matin, rien, sauf l’inattendu, ne pouvait nous empêcher d’être à ce rendez-vous combien important des vacances. Le plus sérieux à nos yeux pendant cette période, mais le moins attendu par les jeunes plutôt intéressés aux activités mondaines. Cela se comprend, nous sommes dans un pays où les choses de l’esprit sont banalisées au profit des futilités et stupidités de tout genre qui mobilisent tout l’argent de la République. Ce matin-là, c’est un groupe de jeunes avides de savoir, en quête de nouvelles découvertes, motivés et attentionnés que j’ai découverts. Ils avaient pour tout bagage les livres, du papier, une plume, ces outils qui doivent leur permettre de décrire le monde dont ils rêvent habiter. Ce pays qu’ils souhaiteraient inventer, sans l’aide de l’État qui ne songe même pas à leur existence, voire penser à les accompagner dans le cours de cette découverte, le temps d’un seul mois.

Ce matin-là, ce sont des jeunes de seize à vingt-quatre ans que j’ai vus, les yeux grands ouverts, suspendus aux lèvres du professeur, cet homme du monde, poète marginal, qui ne désespère pas devant la situation lamentable du pays. Lui qui croit encore que la jeunesse haïtienne peut réaliser des prodiges.

Vendredi matin, je suis retourné à la bibliothèque. Les jeunes étaient encore là. Pleins d’assurance dans la voix, dans une langue assez maîtrisée, ils discutaient sur Fille d’Haïti, le premier roman de Marie Vieux-Chauvet. Certains timides, d’autres plutôt indépendants, ils exposent leurs opinions, défendent leurs points de vue avec tact. Ils sont des écoliers du secondaire, des étudiants de l’École normale supérieure, des étudiants en gestion, journalisme et qui cultivent un goût pour la littérature. Ils n’ont pas de gros moyens comme nos chers parlementaires et directeurs généraux qui se la coulent douce tous les jours à la plage, mangent dans les grands restaurants de Pétion-Ville ou de Manhattan le temps d’un week-end avec les taxes des contribuables. Les institutions publiques qui travaillent dans le domaine du livre n’ont pas levé le petit doigt pour soutenir cette activité. Leurs responsables se plaignent comme le simple citoyen qu’ils n’ont pas de moyens. Pas de budget pour reprendre les propos de la directrice de la Bibliothèque nationale, Emmelie Prophète, lors de son intervention à la Fokal jeudi dernier autour de la littérature jeunesse. Heureusement qu’il y avait Le Nouvelliste et l’Association Legs et Littérature (ALEL) qui ont donné des livres pour permettre la réalisation de cet atelier qui fait tant rêver ces jeunes…

Dieulermesson PETIT FRÈRE, M.A.

Partagez

Auteur·e

dpetitfrere

Commentaires